L’étang de Robien : étang utilitaire, étang d’agrément.Dossier
Autrefois plan d’eau naturel bordé par des prés et des pâtures en contrebas de la métairie de Robien, à la limite avec la commune de Ploufragan, l’étang de Robien est traversé, depuis le pont des Villes Moisans jusqu’à Brézillet, par un cours d’eau dénommé au 19e s. « Ruisseau des prés de Robiens », puis « Ruisseau de Gouédic ».
La minoterie « Les Grands Moulins de Saint-Brieuc » est fondée à partir de 1910 au n° 80 de la rue Jules Ferry, par M. Louis Epivent, industriel, et M. William Le Besque, ancien élève de l’école d’Agriculture de Beauvais. Pour faire fonctionner l’imposante « usine de Robien », considérée comme l’une des meilleures industries régionales, Epivent capte, en plus des eaux du Gouët depuis le barrage de St. Barthélémy, l’eau de l’étang de Robien, tout proche, par l’intermédiaire du « barrage Epivent » et de grandes buses de briques.
A la fin des années 1920 la minoterie Epivent-Le Besque est en partie transformée en aciérie.
Cette dernière sera reprise en 1936-1937, au cours d’une décentralisation stratégique des Usines et Aciéries de Sambre et Meuse, groupe du nord spécialisé dans l’outillage en acier forgé.
Dans le contexte industriel favorable des Trente Glorieuses la fonderie est le principal producteur français d’acier au manganèse et fournit un large éventail d’objets, commandés à l’international. L’ aciérie puise de l’eau dans l’étang de Robien pour le traitement des pièces et le refroidissement des fours. L’eau du bassin est refoulée vers l’usine par l’actuel rond-point Edouard Herriot et la rue Jules Ferry. L’entreprise est responsable de son entretien : une vidange est effectuée tous les 2 ans pour empêcher l’envasement et éviter le colmatage autour des 3 pompes.
En 1976, Sambre et Meuse souhaitant penser différemment le refroidissement de ces équipements, la ville de Saint-Brieuc projette d’acquérir l’étang de Robien, le barrage avec déversoir et le petit abri des engins de manœuvre et des pompes. Le plan d’eau serait utile comme bassin de compensation pour le réseau d’égout pluvial, afin de régulariser le débit du Gouédic et éviter les crues éventuelles comme celle de 1973. L’étang pourrait également servir d’« élément décoratif » au voisinage de la plaine de jeux de Brézillet pour le canotage et la voile1. Les travaux envisagés par la Ville consistent en un désenvasement périodique complet de la retenue, et en un désenvasement partiel annuel exécuté par les aciéries.
Il faudra cependant attendre une trentaine d’années pour que la transaction se fasse.
Entre temps, en 1995, le groupe Sambre et Meuse fusionne avec l’entreprise Manoir Industrie pour créer l’un des premiers groupes européens de transformation de métaux, spécialisé dans la production notamment de pièces résistant à l’usure pour les machines de broyage et de concassage des mines et des carrières. L’étang de Robien conserve le même usage pour le refroidissement des installations.
Racheté en 2008 par la Ville, ce dernier subit de nouveaux travaux de désenvasement en 2009.
La Société de Pisciculture intervient à ce moment-là pour protéger les multiples variétés de poissons que les pêcheurs viennent en effet taquiner depuis plusieurs années. Plus de 60 espèces d’oiseaux y ont par ailleurs été recensées. Le plan d’eau est de ce fait signalé comme zone humide sensible. Il a connu plusieurs pollutions industrielles aux hydrocarbures et au chlore, et la pollution urbaine ordinaire l’a aussi transformé peu à peu en véritable décharge subaquatique. Cependant, le problème majeur reste l’envasement qui asphyxie le plan d’eau.
Après une fonction utilitaire séculaire, la volonté locale actuelle est de faire de l’étang de Robien un plan d’eau d’agrément autour d’une riche biodiversité : laisser sauvage la partie nord pour créer une réserve de poissons et un refuge pour les oiseaux, tout en aménageant la rive sud en chemin piétonnier, dans la suite logique du chemin du Légué qui remonte vers Ploufragan.
Et ce, pour le plus grand plaisir des pêcheurs et des promeneurs.
Archives municipales de Saint-Brieuc
Sophie Ehouarne
- Délibération du Conseil municipal n°35. 28 juin 1976. AMSB. 225 W 23.
Sources
. Plan géométrique de la ville de 1806 (4e feuille) - Archives départementales des Côtes d’Armor
. Cadastres des 1814 et 1847 – Archives Municipales de Saint-Brieuc (AMSB)
. Matrices cadastrales - AMSB
. « L’Illustration économique et financière » septembre 1926. AMSB - 4°Bro366
. AMSB - 4°Bro431. 1985
. AMSB – 108 W 54.1976
. AMSB - 225 W 23. 1976
. AMSB - 341 W 38. 2008
. L’inventaire du patrimoine culturel en Bretagne (http://patrimoine.region-bretagne.fr)
. Marcelle Simon, Les fonctions industrielles de Saint-Brieuc, (http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/noroi_0029-182x_1965_num_48_1_7264)