Baudelaire (Le tonneau de la haine) Poésie de Maurice


Quel étrange poème que ce « tonneau de la haine » !
 Il faut d’abord se souvenir du mythe des Danaïdes : plus ou moins manipulées par leur père, les cinquante filles du roi Danaos ont assassiné leurs cinquante cousins-époux. 
Ce crime n’intéresse guère Baudelaire : dans le premier vers, les Danaïdes sont « pâles », presque inexistantes.Ce qui inspire le poète, c’est leur punition : elle est sans fin, tout comme la Haine et la Vengeance sont inextinguibles. 
Les bras de la Vengeance, au deuxième vers sont « rouges et forts » (au contraire des « pâles Danaïdes »). « Eperdue », elle s’empare du tonneau percé, sans même se rendre compte qu’elle aussi est condamnée pour l’éternité par le « Démon » : c’est lui (issu de la tradition biblique) qui fait des « trous secrets » dans le tonneau de la mythologie grecque !Tout ça est quand même un peu confus.Heureusement, Carlos Schwabe (1866 – 1926), peintre et illustrateur, s’est inspiré de ce sonnet pour composer un tableau également intitulé « le tonneau de la haine » (dont vous trouverez la reproduction sur le pdf). 
Grâce à lui, on comprend mieux la bouillie déraisonnable qui révulse Baudelaire. 
La fin du poème est remarquable de pénétration : la haine, la vraie, ne se satisfait jamais. La pire des ivrognesses finit par s’endormir, jamais la haine...
 Elle continue de « se multiplier comme l’hydre de Lerne » : celle-ci avait neuf têtes, qui repoussaient immédiatement dès que Hercule, chargé de la tuer, lui coupait un de ses cous…
 Cent quatre vingts ans après les « fleurs du mal », la Haine ne dort toujours pas sur notre pauvre terre…